Ashish SARWATE
Guitariste de Rock et Blues à l’origine, pratiquant la scène avec mon groupe depuis plusieurs années dans la région de Indore, je ne m’attendais pas à subir ce choc, la première fois que j’ai assisté à un concert de Dhrupad.
C’est Ustad Mohi Baha’ud-din DAGAR, grand maître de la Rudra Veena, que je découvre alors. Fasciné par la liberté de l’expression artistique et la beauté du système des Raags, je décide que je ferai cela : j’irai à Bombay, pour me dédier à l’étude de cet art, pendant deux, trois ans. Je me rends à Palaspe, en banlieue est de Bombay, où je commence en 2002 mon apprentissage sous la guidance de Ustad Zia Fariduddin DAGAR, chanteur, et celle de Ustad Mohi Baha’ud-din DAGAR, son neveu. Dans la pure tradition d’enseignement shishya-parampara, de maître à disciple, dans le respect et la confiance dévolus au Guru, je découvre peu à peu tout un monde et cette rencontre transformera ma vie de façon irrémédiable.
Les années passent, et ainsi pendant 12 ans, je vis auprès des Maîtres. Je réalise que le Dhrupad est plus qu’un art, c’est un mode de vie. Après la disparition du maître chanteur DAGAR, je décide de poursuivre mon apprentissage auprès d’un autre maître : Pandit Pushpraj KOSHTI. Spécialiste de l’instrument rare le Surbahar, artiste Dhrupad émérite, il est un des plus anciens porteurs de l’esthétique de la « Chembur Gharana », incarnée par le père de Ustad Baha’ud-din DAGAR.
Ne souhaitant pas laisser ma guitare pour choisir un instrument indien plus traditionnel, je construis avec l’aide d’un luthier établi dans le sud de l’Inde, un instrument hybride, qui reprend les caractéristiques d’une guitare acoustique mais qui s’enrichit d’apports typiquement « musique indienne » : des cordes-bourdon, un manche creusé, une caisse de résonance plus large. C’est une recherche au long cours, cette adaptation de la musique Dhrupad à un instrument qui n’y est pas forcément destiné au départ. Mais, comme ils disent, c’est la musique qui compte avant tout : le « support » n’est qu’un réceptacle qu’il nous faut aménager, transcender, pour que le chant de l’âme s’élève.